Estampes

Estampes anciennes


Martin Schongauer, La Vierge assise dans une cour, GDUT8637

Albrecht Dürer, Le Chevalier, la Mort et le Diable, GDUT4034

Marc Antoine Raimondi, La Carcasse ou Sur le Chemin du Sabbat, GDUT6223
Martin Schongauer
La Vierge assise dans une cour
Albrecht Dürer
Le Chevalier, la Mort et le Diable
Marc Antoine Raimondi
La Carcasse

Jacques Callot, La Tentation de saint Antoine, GDUT1084

Rembrandt, La Pièce aux cent florins, GDUT7743

William Hogarth, La Brigue des votes, planche II [Canvassing for Votes. Plate II]
Jacques Callot
La Tentation de saint Antoine
Rembrandt
La Pièce aux cent florins
William Hogarth
Quatre images d'une élection

Dès l'âge de 22 ans, Eugène Dutuit se lance dans l'acquisition de ses premières estampes animé par un désir ardent de constituer une histoire exhaustive de la gravure, des origines jusqu'au début du XIXe siècle. Inspiré par les écrits érudits du baron Heineken et d'Adam Bartsch, il rêve de rassembler les pièces les plus remarquables de toutes les écoles artistiques.

Autodidacte passionné, Dutuit bâtit son savoir au fur et à mesure de ses acquisitions et de ses rencontres avec des experts ou des marchands d’estampes de confiance, tel que Louis Jean Eugène Clément, dont les conseils avisés guident ses choix à de multiples reprises. Chaque estampe ou recueil gravé ajoutés à sa collection est soigneusement sélectionné, souvent d’un état exceptionnel, et ayant appartenu à un collectionneur prestigieux.

En 1868, Eugène Dutuit réalise un achat spectaculaire qui fait grand bruit dans le monde de l'art : il acquiert le huitième et dernier exemplaire existant de La Pièce aux cent florins de Rembrandt. Cette estampe, dans son premier état sur papier japon, est exceptionnelle par la grandeur de ses marges. Elle a appartenu à d’illustres collectionneurs tels que Petersen Zoomer, ami de Rembrandt, et Vivant Denon, premier directeur du Louvre. Grâce à cet achat remarquable, Eugène Dutuit se hisse au rang des plus grands collectionneurs de son époque.

Sa collection comporte des pièces majeures d'artistes de renom tels que Marcantonio Raimondi, Albrecht Dürer, Martin Schongauer, Lucas de Leyde ou Rembrandt. Si les trois premiers tomes de son Manuel de l’amateur d’estampes sont consacrés à l'école hollandaise, son domaine de prédilection, le collectionneur ne s’y limite pas. Il collectionne également les primitifs italiens, notamment des nielles du XVe siècle d'une rareté exceptionnelle. L'École allemande est représentée par les magnifiques estampes du Maître E. S (1466), tandis que les Pays-Bas sont mis à l'honneur avec les œuvres d'Hendrik Goltzius (1558-1616) et de Pierre-Paul Rubens (1577-1640). L'École flamande est représentée par Antoine Van Dyck (1599-1641) et sa remarquable série de portraits.

L'École française, quant à elle, y occupe une place de choix avec des artistes tels que Jacques Callot (1592-1635), Claude Mellan, Robert Nanteuil, Gérard Audran ou Edelinck. Le Petit Palais possède la quasi-intégralité des œuvres de Le Lorrain. Le XVIIIe siècle est marqué par la présence des meilleurs graveurs de l'époque, tels que Jean-Michel Moreau le jeune et Gabriel de Saint-Aubin. Le grand Portrait de Louis XV par Leblond est un spécimen rare des débuts de la gravure en couleurs. 

L'école anglaise est évoquée à travers les noms de William Woollett, William Hogarth et Robert Strange, tandis que l'école espagnole se distingue avec les premiers tirages des Caprices, la série Tauromachie de Goya ou les belles eaux-fortes originales de Ribera.

Au début du XIXe siècle, les graveurs italiens tels que Raffaello Morghen (1758-1833), Giuseppe Longhi (1766-1831) et Paolo Toschi (1788-1854) trouvent également leur place dans la collection d'Eugène Dutuit.

L’ambition de celui-ci dépasse celle de la simple collection personnelle : il écrit un Manuel de l'amateur d'estampes prévu en huit tomes, ouvrage destiné à guider les amateurs dans leur découverte. Avec minutie, il y note les prix des estampes lors des ventes auxquelles il assiste, offrant ainsi une estimation précieuse des pièces les plus exceptionnelles. Il y aborde les diverses écoles artistiques : l'école italienne et espagnole, l'école allemande, l'école hollandaise, l'école française et anglaise. Eugène Dutuit publie également L’Œuvre complet de Rembrandt en 1883, illustré d’héliogravures, dans lequel il met en lumière l'ensemble de l'œuvre de ce maître incontournable. Avec un soin méticuleux, le collectionneur a rassemblé nombre d’estampes remarquables, dont les états exceptionnels ont traversé les générations.

Estampes modernes


Félix Bracquemond, Edmond de Goncourt, PPG176

Félix Buhot, L’Hiver à Paris, PPG208

Toulouse-Lautrec, Répétition générale aux Folies Bergère, PPG2174

Félix Bracquemond
Edmond de Goncourt,
3e état

Félix Buhot
L'Hiver à Paris
Henry de Toulouse-Lautrec
Répétition générale
aux Folies Bergère
Grimelund, Rue de village sous la neige au soleil couchant, ou La Neige en Norvège, PPG2313 Pierre Bonnard, Affiche de l’exposition « Les peintres-graveurs », PPG46378 Georges Rouault, Femme fière, planche pour "Les Fleurs du mal", PPG4855
Johannes Martin Grimelund
Rue de village sous la neige
au soleil couchant
Pierre Bonnard
Affiche de l’exposition
« Les peintres-graveurs »
Georges Rouault
Femme fière,
don de l'indivision Petiet

Afin de compléter la collection d’estampes anciennes des Dutuit, Henry Lapauze (1867-1925), premier conservateur puis directeur du Petit Palais, s'attache à acquérir des œuvres du XIXe siècle et du début du XXe siècle. Soucieux de mettre en valeur les créations les plus récentes et d'éveiller l'intérêt du public pour ces œuvres d’art méconnues, alors que l'estampe traverse une crise liée à la multiplication des procédés photomécaniques, il crée le « musée de l’Estampe moderne ». Ce nouvel espace est inauguré le 27 juin 1908, au rez-de-chaussée du Petit Palais, dans la galerie donnant sur l'Avenue des Champs-Élysées, à l’opposé de la galerie du Cours-la-Reine qui accueillait déjà les estampes de la collection Dutuit. 

La collection d’estampes modernes naît donc véritablement avec cette initiative. Afin de la constituer au plus vite, Lapauze obtient de pouvoir solliciter directement collectionneurs et artistes. Cette même démarche de collecte a déjà permis de constituer le fonds de dessins modernes dont une partie est présentée dans la Grande galerie, aux côtés des peintures, et sera reprise pour la création du musée de la Médaille française. Grâce à son important réseau et sa force de séduction auprès d’interlocuteurs tant français qu’internationaux, le conservateur voit sa démarche couronnée de succès. De très nombreux donateurs – collectionneurs et artistes, mais aussi marchands et éditeurs, ayants-droits ou amis d’artistes ayant à cœur de valoriser la production de leur proche – se mobilisent pour accompagner ce projet. 

Parmi ceux-ci, Henri Béraldi, grand collectionneur d’estampes, bibliophiles et historien de la gravure, offre cent portraits d'hommes d'État, de savants ou d'artistes, tels ceux de Jacques-Louis David, d’Honoré Daumier ou encore de Gustave Doré. Jeanne Chaplin, veuve du peintre Charles Chaplin, offre plus de 600 estampes dues tant à son défunt époux qu’aux amis, élèves et collègues de ce dernier. De très nombreux dons plus modestes, d’artistes célèbres ou aujourd’hui méconnus, viennent compléter ces ensembles importants : Félix Bracquemond, Félix Buhot (par l’intermède de sa veuve,  Henrietta Johnston), Edgar Chahine, Théophile Alexandre Steinlen, Henri de Toulouse-Lautrec (grâce à son ami Adolphe Albert)… Ce sont quelques 3000 estampes d’artistes vivants et de graveurs du XIXe siècle que Lapauze parvient ainsi à réunir grâce à la générosité de ces donateurs.

Le noyau issu de cette première collecte de 1908 est activement enrichi par des achats et des dons ultérieurs, ainsi que par un ensemble d’estampes éditées par la Ville de Paris, commandées chaque année par le biais de la 4e Commission, dont le Petit Palais devient dépositaire en 1912. La collection s’accroît encore aujourd’hui, grâce à de nouvelles généreuses libéralités et par des achats qui visent à en compléter les manques. La diversité des œuvres ainsi acquises accompagne celle du fonds déjà existant : techniques variées, estampe originale ou d’interprétation, artistes reconnus ou redécouvertes.