Schongauer est né vers 1450 à Colmar, ville libre d’Empire, magnifiquement située dans la prospère Haute-Alsace. Son père, originaire d’Augsbourg, était orfèvre et il fut naturellement le premier maître du jeune Martin. L’art de la gravure sur cuivre venait de naître, vers 1430, dans les ateliers d’orfèvres de la Rhénanie du Sud, entre les riches cités de Constance et de Strasbourg.
C’est Schongauer qui devait donner à cette technique ses lettres de noblesse et devenir le premier peintre graveur dont le monogramme correspond pour nous à un nom certain et à une biographie sûre.
Après son apprentissage, Schongauer accomplit son tour de compagnonnage, descendant le Rhin jusqu’à Cologne avant de gagner les Pays-Bas. Ainsi s’expliquent les deux composantes de son art : l’héritage du « style doux » du Gothique International et l’assimilation du nouveau réalisme promu par les grands maîtres flamands, Jan van Eyck et Rogier van der Weyden.
L’influence de Schongauer fut considérable, sur ses contemporains et sur les artistes des générations suivantes, Dürer en premier lieu.
La Vierge d’humilité assise directement sur le sol est une création de l’art italien du Trecento. Variante de la Vierge de tendresse, ce motif d’origine dominicaine fut adopté par l’École siennoise avant d’être diffusé dans toute l’Europe par les artistes du Gothique international.
La Vierge de Schongauer est de même humblement assise sur un tertre de gazon mais la riche corolle des plis de sa robe forme autour d’elle comme un trône majestueux.
Traditionnellement, la tour, le jardin clos ou la cour fermée constituaient des allusions symboliques à la virginité de Marie. Schongauer a su faire de ce lieu serein et protégé un parfait écrin pour le groupe de la Mère et de l’Enfant : Jésus, très naturel dans sa position et son geste de porter un doigt à sa bouche, est soutenu avec attention par Marie qui le contemple avec recueillement.
Pour la première fois dans l’histoire de la gravure occidentale, la technique du burin est suffisamment maîtrisée pour magnifier un trait souple et fluide et pour traduire les volumes et la lumière. Dans cette cour où le vide s’est fait mystérieusement silence, se tient l’une des Vierges les plus poétiques de tout l’art allemand : menue et grave, empreinte d’une grâce surnaturelle qui la transfigure par-delà la mélodie figurative des lignes.
S. R. de B.
Autres bases documentaires
Découvrez une sélection de bases documentaires en ligne présentant des oeuvres du Petit Palais ou des documents en lien avec l'histoire du bâtiment et du musée.