De douze ans plus jeune que Gustave, Juliette Courbet apparaît dans ce portrait en fille de notable rural, posant pour son frère devenu parisien depuis l’automne 1839. De cette effigie d’adolescente au regard intense mais fuyant, émane une atmosphère troublante qui correspond bien à la personnalité complexe et originale du modèle.
Le soin porté au décor de cet intérieur bordé d’un miroir qui ne reflète rien est une rareté dans l’œuvre de Courbet qui préféra généralement représenter ses figures en plein air ou devant un fond totalement neutre. Les tonalités claires et tendres, l’importance donnée à la ligne et aux contours, la préciosité du rendu des tissus semblent marqués, pour cette unique fois, par l’exemple d’Ingres qui règne alors sans partage sur l’art du portrait en France.
Dans une lettre à ses parents, Courbet signalait qu’il présentait « pour rire » ce tableau au jury du Salon de 1845, sous le titre « la baronne de M. ». Très attentif aux mécanismes du Salon et aux stratégies de commercialisation qui pouvaient s’y développer, Courbet, alors plein d’ambition et confiant en l’avenir, ne voyait-il pas dans ce subterfuge plutôt qu’un simple canular de jeune rapin, le moyen de trouver des commanditaires en faisant croire à un portrait de commande émanant d’une personne de qualité ? Quoiqu’il en soit le portrait fut refusé par le jury du Salon.
Tout au long de sa vie, Courbet a reçu le soutien de sa famille et plus particulièrement celui de la plus jeune de ses quatre sœurs, Juliette. Unique héritière, restée célibataire, elle consacra le reste de sa vie à défendre l’œuvre de son frère et fit don aux musées français d’œuvres majeures restées dans l’atelier. Le Petit Palais reçut ainsi, en 1909, six tableaux parmi lesquels les portraits de Juliette, de Zélie, seconde sœur de l’artiste et de Régis Courbet, leur père.
I. C.
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