Cette scène de genre rurale peinte par Courbet offre une vision sereine de la vie paysanne déclinée sur un format monumental. Elle est le témoignage de son séjour chez son ami le Docteur Ordinaire durant l’été 1867.

La composition s’articule autour de trois personnages endormis. Harassés par les travaux des champs, des paysans s’accordent un repos à l’ombre des arbres. Les bœufs ont été détachés de leur charrette qui apparait au second plan. Les deux fils du Docteur Ordinaire, Olivier et Marcel, ont servi de modèle pour les faucheurs endormis. Dans un premier temps, à la place de la nature morte sur le devant de la composition se tenait une paysanne. Courbet modifia son œuvre après le Salon de 1869 préférant remplacer cette figure supplémentaire par une nature morte.

A l’image de Constant Troyon (1810-1865) et de Rosa Bonheur (1822-1899) quelques années plus tôt, Courbet s’attache à dépeindre sur de grands formats une ruralité paisible. La sieste pendant la saison des foins est en ce sens caractéristique de l’évolution des genres qui s’opère au Salon sous le Second Empire. En effet, l’essor de la peinture de genre et l’évolution de la peinture d’Histoire troublèrent les catégories établies. Ainsi, lorsque Gustave Courbet expose cette toile de plus deux mètres de haut avec en son premier plan des bovins, il s’inscrit pleinement dans la suite de Troyon. Ce dernier, lors de l’Exposition Universelle de 1855, exposait son œuvre monumentale Bœufs allant au labour, effet de matin (musée d’Orsay). Haute de presque quatre mètres, cette toile hissait alors la peinture animalière au rang de peinture d’Histoire. Courbet avait déjà usé de cette inflation des dimensions en exposant au Salon de 1857 Les Demoiselles des bords de la Seine (Petit Palais), scène de genre de plein air avec un traitement réaliste des figures.

Gustave Courbet, en cet été 1867, espère beaucoup de son tableau La sieste pendant la saison des foins destiné au Salon de 1869. Cependant l’accueil réservé que lui en fera le public sera une désillusion profonde. La critique est très sévère avec l’artiste : ses bœufs sont « hydrocéphales » selon Armand Silvestre, Louis Auvray soupçonne le peintre d’avoir « un goût prononcé pour la laideur » tandis que Paul Casimir-Perier classe le tableau dans « la catégorie des peintures qu’on veut ignorer ». Ce type de scène rurale d’inspiration hollandaise, à la frontière de la peinture animalière, avait alors trouvé ses maîtres : Le Labourage Nivernais (Musée d’Orsay) de Rosa Bonheur a déjà vingt ans en 1869. Une nouvelle génération de peintres animaliers se spécialise dans la représentation des bovins. Ainsi quatre années après la mort de Troyon, son élève Emile Van Marcke (1827-1891) reprend avec succès les compositions qui firent la réputation de son maître et obtient une médaille à ce même Salon de 1869. Courbet, huit ans avant sa mort, n’aura pas réussi à s’imposer parmi les animaliers de ce Salon. L’œuvre ne trouvera pas d’acquéreur et restera dans l’atelier du peintre avant d’être achetée par la ville de Paris à l’occasion de la vente après décès organisée en 1881.

H. V. De S.

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