Tissot situe la parabole du fils prodigue au Moyen Age. En peintre historiciste, il imagine le départ du fils prodigue dans la Venise du XVe siècle et son retour en mendiant déchu dans l’Europe du Nord médiévale. Ce mélange des époques ne fera pas l’unanimité.

L’évangéliste saint Luc rapporte la parabole du Fils prodigue : après avoir réclamé sa part d’héritage à son père, un fils quitte la riche maison familiale. Il dilapide son héritage puis, frappé par la famine, il décide de revenir vers la maison paternelle. Son père le voyant de retour l’accueille avec bienveillance. C’est cet épisode du Nouveau Testament que James Tissot illustre à travers deux tableaux représentant le début et la fin de la parabole.

Longuement préparés par de nombreux dessins, ces deux tableaux révèlent la forte  influence des maîtres anciens sur Tissot. Comme il l’écrivait à son amis Edgar Degas : « Je suis dans les Carpaccio et je n’en sors pas ». Et c’est bien ce peintre vénitien de la fin du XVe siècle qui fournit à Tissot son modèle pour le Départ de l’enfant prodigue. Les architectures environnantes et la composition générale sont largement empruntées au Miracle de la relique de la Vraie Croix (1494, Venise, Accademia) et au Cycle de Sainte Ursule (1500, Venise, Accademia).

Quant au Retour de l'enfant prodigue, c’est auprès des maîtres flamands et de l’architecture nordique que Tissot prend sa source. Les riches vêtements des personnages rassemblés  dans la cour rappellent l’art de Hans Holbein (1497-1544) dans Les Ambassadeurs (1533, Londres, National Gallery). Les bâtiments que l’on distingue en arrière-plan de la composition, sont caractéristiques de l’architecture flamande de la fin du Moyen-Age, modèle largement diffusé par la mode du Néo-Gothique.

L’éclectisme assumé de ces sources iconographiques et stylistiques n’est pas toujours du goût de la critique. Dans son compte rendu du Salon, Hector de Callias suggère à Tissot de « regarder le calendrier » et s’étonne que le peintre se soit « lancé à la poursuite d’Holbein ». Paul Mantz ironise à son tour et voit dans ces œuvres l’ « Apothéose de la curiosité et [le] triomphe du bric-à-brac » (La Gazette des Beaux-Arts).

Paradoxalement Le retour de l’enfant prodigue a été mieux compris lors de son exposition à Londres. La Royal Society of British Artist exposa l’œuvre en 1864. Le public anglais apprécia le tableau pour ses résonnances avec le mouvement des Préraphaélites. Cette première exposition anglaise encouragera par la suite Tissot à resserrer ses liens avec le monde artistique britannique. C’est d’ailleurs à Londres qu’il trouvera refuge durant les évènements de la Commune.

Ces deux œuvres, exposées ensemble au Salon de 1863, furent acquises séparément par le musée du Petit Palais à sept ans d’écart. A nouveau réunies, ces toiles permettent de saisir pleinement l’effet que produisirent ces deux compositions historicisantes au Salon et de comprendre combien elles formaient les deux chapitres d’une même histoire.

H. V. de S.

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